Billet d'humeur

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Comment devenir djihadiste en quelques clics?

La récente célébration de « l’anniversaire » de l’attentat niçois du 14 juillet 2016 rappelle que ces événements ont été commis par des terroristes ayant eu recours à Internet à des fins d’endoctrinement puis de « glorification » de leur action.

Le djihadisme ou la guerre des symboles

Les démocraties occidentales doivent désormais faire face à un problème qui trouve son origine symbolique avec le choc du 11 septembre 2001 (Cf. Pascal Lardellier, « 11 septembre 2001. Que faisiez-vous ce jour-là ? » ; L’Hèbe, 2006). En 2015, la France a, elle, connu un double choc : celui du massacre de la rédaction du magazine Charlie Hebdo et des clients du supermarché Hyper Casher le 7 janvier, suivi de la vague d’attentats parisiens du 13 novembre. Au total, depuis 2015, les djihadistes auront tué 239 personnes en France.

Les attaques survenues en Catalogne jeudi 17 août relèvent de cette même symbolique. En frappant l’Espagne, dans la ville mythique d’Erasmus et de L’Auberge Espagnole, de la fête et de la tolérance, « les djihadistes nous frappent non pas pour ce que nous faisons mais parce que nous sommes », comme le rappelle Pascal Brukner. Pour le philosophe, l’Espagne représente, aux yeux des djihadistes et des musulmans intégristes, une terre musulmane, symbole de la grandeur de l’islam avant la chute de Grenade. Pour ces derniers, elle a été illégalement reconquise par Isabelle la Catholique… encore un symbole fort.

Le détournement du sens de mots connus de l’Islam fait également partie de la propagande de Daech. C’est ainsi que ses membres parviennent à séduire les jeunes à travers un storytelling bien rôdé qui utilise et travestit des termes tels que «Hijrah», «Jahiliya», «Murtadd», «Tâghût», «Tawhid». Olivier Carré et Mathieu Guidère, deux spécialistes de l'islam éclairent la récupération politique faite par les salafistes radicaux et expliquent en quoi cette imposture historique et sémiologique vise à redonner un sens aux actions barbares des futurs adeptes......pour lire la suite.

 


Le pouvoir creuse le fossé des générations (17 mars 2016)

Article écrit avec Bernard Radon, pour le Magazine Bilan.

 

La notion de pouvoir, source de toutes les manœuvres et de toutes les convoitises, se voit profondément modifiée. En effet, les organisations, telles qu’elles ont été dessinées par les générations antérieures, ne correspondent plus aux attentes des Y et les Z pour lesquels le paradigme glisse davantage vers une approche cousine, celle de l’autorité. Alors, quelles différences essentielles trouvent-on entre ces deux notions qui apparaissent intimement liées alors qu’elles semblent, plus que jamais, séparer les Anciens des Modernes ? Si la première a toujours fasciné et fait tenir sous son emprise, sa domination des cohortes de salariés, elle se heurte aujourd’hui aux limites que lui fixent les Générations Y et Z. Si ces dernières la rejettent en bloc c’est qu’elle implique soumission et obéissance à une forme de hiérarchie verticale, concept devenu rigide et dénué de sens à leurs yeux. Il est évident que dans une société reposant essentiellement sur la transparence, l’immédiateté et l’instantanéité, la notion peine à trouver sa place. On lui préférera celle de l’autorité qui repose sur la reconnaissance, la compétence, le leadership et le charisme.

 

Cependant, dans le contexte de rupture tel que nous le vivons actuellement, il n’est pas nécessaire d’être un anthropologue averti pour reconnaître que les générations s’éloignent et que le fossé intergénérationnel se creuse. S’agit-il d’une incompréhension des mots ou d’un mal plus profond ? Quoi qu’il en soit, le pouvoir tel qu’il est appliqué ou ressenti n’y est pas étranger. Il fragilise le contrat de confiance déjàsérieusement ébréché. Mais il est temps pour ceux qui tentent d’amadouer, avec des discours enjôleurs, des jeunes générations qui se préparent à vivre les « 30 douloureuses », acceptent d’assumer leurs responsabilités. Il devient vital de revisiter les postures managériales et de redéfinir des règles du jeu en repensant un cadre adapté à l’environnement et propice à la création de valeur. Ses contours sociologiques ou économiques, doivent intégrer que les Y et les Z, très sensibles à l’équité sociale, au partage, mais également au respect de la vie privée qu’ils ne veulent en aucun cas voir « polluée » par la vie professionnelle. Ils ne sont pas, comme beaucoup aiment à le penser, réfractaires à l’autorité. Bien au contraire, ils attendent de leurs managers des comportements responsables et courageux qu’ils s’autorisent à transgresser. Ainsi les jeunes pourront participer à l’écriture de l’histoire, y apporter leur contribution, et enfin se réapproprier une mémoire quelque peu confisquée par leurs ainés.

 

C’est à ce prix que les mots engagement et confiance pourront reprendre de leur superbe et ainsi favoriser le retissage des liens intergénérationnels et favoriser la ré-humanisation des relations devenues trop souvent virtuelles. Mais cela relève d’un véritable pari fou car cela implique que chacun accepte de déconstruire ses représentations et cherche à retrouver une place dans ces nouveaux espaces. Si tel n’était pas le cas, ayons en tête que si « L’arrogance précède la ruine, l’orgueil précède la chute » et cela est valable qu’il s’agisse de Bobos (Baby boomers), Momos (les X), Yoyos (les Y) ou « Zozos »…

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Le politiquement correct, ce mal qui nous fait "perdre la tête" 

Les récents évènements qui se sont déroulés en Isère sont d'une cruauté et d'une barbarie sans commune mesure. Et je ne parle pas, dans ce billet,  des atrocités que viennent de subir la Tunisie ou encore les communautés chrétiennes d'Orient.

Une fois de plus, notre compagnon de route, ce commissaire politique qui s'invite à la table de toutes nos réflexions (ce cher politiquement correct) pousse certains de nos journalistes et politiques à ne pas vouloir qualifier à leur juste "valeur" ces actes de terrorisme.

On préfère ainsi le mot "attaque" à "attentat", l'expression "acte isolé sans lien" à "une action coordonnée suivant une idéologie clairement établie", et on nous rappelle sans cesse que les premiers à être victimes de ces extrémistes sont les Musulmans alors que ce sont les Chrétiens, en premier lieu qui se font massacrer massivement (en Orient comme en France où une fusillade meurtrière a été évitée in extremis).

 

Celles et ceux qui travestissent ainsi la vérité sont, à mes yeux, les complices d'une situation qui risque de dégénérer rapidement et c'est à se demander si ce n'est pas là l'objectif poursuivi. Mais les Français ne sont pas dupes et ils constatent bien que la situation devient dangereuse sur leur propre territoire national. Je ne pense pas, comme beaucoup, que ces derniers manquent de quelque courage qu'il soit, je pense au contraire qu'ils sont dans une position d'attente et qu'ils ont peur. Peur que tout ce qu'ils pourraient dire ou entreprendre pour faire évoluer la situation ne se retourne contre-eux au nom de ce "politiquement correct" qui nous censure sans cesse.

 

Or, avec les derniers faits orchestrés à Saint-Quentin-Fallavier, nous avons franchi une étape décisive. Un homme a été "décapité", sa tête accrochée à un banal grillage et un auto-portrait (selfie) immortalisant la cruauté de l'acte terroriste envoyé en Syrie. 

 

Cela se passe en France,  Pays où un autre homme, quelques 226 ans auparavant, subissait le même sort, marquant ainsi une période de rupture qui transformera la Nation: la Révolution française. Troublante coïncidence, n'est-ce pas?

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Lutter contre le politiquement correct en "éduquant"

S’il est bien un fléau dans notre société actuelle contre lequel il devient urgent de lutter, le « politiquement correct » procédé empreint d’éthique et de morale que l’on agite lorsqu’un sujet nous embarrasse doit être de ceux-là. Le bilan des ravages qu’il génère dans notre société (le dramatique attentat qui a coûté la vie à dix-sept citoyens français en est une conséquence directe évidente) risque de s’alourdir sérieusement si nous ne prenons pas rapidement les mesures qui s’imposent. La prise de distance avec les postures hypocrites et lâches ou autres discours démagogiques qui plongent inlassablement nos démocraties dans une posture quasi « anti-démocrate », devient nécessaire au risque de voir la situation se dégrader dangereusement.

Même si cette attitude peut, en atténuant excessivement des formulations qui pourraient choquer, apparaître comme un « liant social », il n’est pas inintéressant de rappeler la définition de l'historien américain Jacques Barzun, pour qui « le politiquement correct ne proclame pas la tolérance ; il ne fait qu'organiser la haine». En ne se faisant le porte-parole que de minorités très actives, il divise et ne fait qu’entretenir des foyers des tensions provoqués par une véritable censure intellectuelle (dictée par des Bobos bien pensants) qui rend impossible l’expression sur des sujets « jugés » inconvenants. Or, un peuple doit pouvoir s’exprimer, et c’est en cela même que l’on reconnaît un citoyen : son droit de parole au sein de l’agora.

 

Le monde de l’entreprise est également concerné par ce phénomène. Dans cet univers, le « politiquement correct » a indéniablement une responsabilité majeure dans l’étiolement de l’autorité, et cela est grave car cela revient à admettre que plus personne n’est l’ « auteur » ou « n’autorise » de quoi que ce soit. Comment une société peut-elle fonctionner ainsi, sans règles, sans cadres qui ne soient respectées? Là encore, nous trouverons l’explication dans le manque de courage managérial pour celles et ceux qui se cachent derrière ce concept obscur et fumeux, mais surtout, pour d’autres, dans la crainte « d’être jugés », car le « politiquement correct » opère avec des procédés proches de ceux utilisés par l’Inquisition en d’autres temps, c’est à dire, essentiellement à charge. 

 

En réalité, le règne du « politiquement correct » fragilise significativement l’avenir et la pérennité de nos organisations. Il cache une forme d’irrespect voire de mépris, à commencer de la part des « Bobos » à l’égard des jeunes générations (Y et Z). Cette bienveillance « paternaliste » et condescendante n’a pour effet que de provoquer méfiance et défiance, sentiments qui vont à l’encontre de la confiance, alors source de créativité et de valeur.

 

C’est pourquoi, afin de (re)tisser des liens de confiance, essentiels à la survie « sociale » de l’entreprise, il est désormais nécessaire que nous acceptions quelque évolution de notre mission. Nous devons maintenant prendre conscience que nous avons, malgré nous, une responsabilité « éducative » qui dépasse les aspects techniques, outre nos fonctions managériales. L’abandon successif de toute forme d’autorité par l’Etat, l’Ecole et les Parents nous invite à doter celles et ceux qui nous suivent des moyens nécessaires à leur construction, et en les amenant à s’ « ex-ducerer », à « sortir d’un cadre qui doit être fixé et surtout respecté ». Ainsi, après avoir transgressé, ils seront en mesure de revenir en hommes et femmes libres au sens gidien du terme, en s’étant approprié l’histoire et en apportant leur contribution dans une continuité nécessaire. Néanmoins, comme aime à le rappeler le Professeur Luc Boyer, « il ne peut y avoir continuité sans rupture », alors, profitons de cette crise pour avancer car le futur s’écrit maintenant, sans mensonges, ni euphémismes, périphrases, ou circonlocutions, n’en déplaise à certains.

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